Extrait du texte « Tempête dans un verre d’eau (forte) » par Marie-Anne Lorgé dans Visites d’atelier Vol 3, éditions mediArt, 2007 :
Cursus aux Arts et Métiers, sur les mêmes bancs que Jean-Marie Biwer et Patricia Lippert. Avec un premier maître à créer et surtout penser, Roger Bertemes : « c’est lui qui m’a initiée à la gravure, c’est à lui que je dois ma rencontre avec la matière, le cuivre, très féminin, que je travaille de préférence au zinc, à cause de sa couleur et des procédés volontaires qu’il implique. » (…)
L’œuvre d’Isabelle Lutz est sereine mais pourtant torrentielle, emplie d’énergie. Isabelle Lutz est intimement liée au mouvement, un mouvement spirituel (et non pas métaphysique) qui ne dispense pas le corps », du corps qui bouge : « l’enveloppe charnelle est toujours là ». (…)
Finalement – une boucle qui pourrait être à l’origine de tout – il y a l’Inde. Un « choc culturel fantastique » qui a favorisé une rencontre…avec « le bouddhisme de l’action » : « j’ai compris que les désirs mènent à l’illumination et, surtout, que ce que l’on donne aux autres est une énorme responsabilité. »
L’acide n’est plus son révélateur à secrets – « ses morsures m’ont empoissonnée » – elle privilège désormais les creux singuliers que délivre le berceau, « aussi direct que la pointe sèche ». L’outil est paradoxal – à l’image de l’artiste, calme au dehors et bouillonnante au-dedans – il évoque la rondeur et la douceur mais n’en est pas moins exigeant : « c’est très physique et très très long. » (…)
Contrairement à ce que la rumeur colporte, le noir d’Isabelle Lutz n’est pas signe de deuil. Et non. C’est une couleur qui prend l’air, qui en mesure la musicalité ; c’est une partition universelle où chaque figure, chaque signe, chaque note (noir forcément, puis blanche forcément) indique les accords (ou désaccords) de la gamme éternelle.(…)